15 juillet 2009

RonRon prêt à faire rugir LAL

Ron Artest a donc signé chez les Lakers, dans une représentation de « Comment être favori à sa propre succession ».




Petit rappel des faits : les Lakers dépassent allégrement la masse salariale tolérée par la ligue, avant même de re-signer trois pièces maitresses : Ariza, Odom et Brown. Si ce dernier n’a eu qu’un rôle modeste et les prestations salariales qui vont avec, le premier cité a laissé son agent partir au combat. Cet agent : David Lee, pas inconnu au bataillon car s’occupant des intérêts de Bynum. L’été dernier, le jeune pivot a eu droit à un beau contrat, grâce à son potentiel et son profil atypique : des grands gaillards avec sa mobilité et ses mains, ça ne court pas les parquets.


Ariza a un beau potentiel aussi, mais un profil beaucoup moins rare. Du poste 3 athlétique, c’est tout de suite moins inhabituel. Tellement que le front office des Lakers en avait caché un dans sa manche pendant les négociations. Sorti avec un petit sourire en coin, comme lorsqu’on révèle sa quinte flush au regard médusé de Patrick Bruel. Les Lakers ont donc un autre poste 3 titulaire, pour le même prix. Ariza ayant fait le difficile, LosAngeles s’est tourné vers Artest sans remords. Ce dernier s’est empressé de bondir sur l’occasion, en acceptant un contrat idyllique du point de vue de LAL. Même si l’on prend en compte les probables futures amendes à payer.


Généralement, l’on essaie de ne pas trop casser la dynamique collective d’une équipe championne, surtout qu’on la sentait très bien huilée, et à la fois n’ayant pas encore atteint le point optimal. Ariza jouait un rôle prépondérant dans l’équipe et offrait le luxe d’être jeune. Ne pas être arrivé à prolonger une trouvaille (passé par NYC et Orlando, sans trouver sa place) peut être vu comme un échec, que le front office se serait empêché de dissimuler derrière un nom clinquant. Et si Artest n’était pas un rouage satisfaisant ? Bien qu’admiratif devant la saison de Ariza, je ne partage pas ces doutes. Voici pourquoi :



Allumer le feu

On le sait, l’ami Ronald n’a pas vraiment sa langue dans sa poche. Normalement, il n’est plus sensé nous refaire un tour dans les gradins, bien que LAL cristallise certaines tensions (les « Beat LA » peuvent vite devenir légion) et qu’elles risquent de se focaliser sur celui qui est le plus apte à péter un plomb. Mais bon, quand on troque un numéro provoc’ comme le 96 pour un 37 en hommage à Michael Jackson, c’est signe que l’on entre dans la maturité.


Artest devrait donc se limier à son rôle d’aboyeur sur le terrain. Fisher au discours, Kobe en exemple, c’était quand même assez cérébral comme leadership. Ajouter Artest, c’est ajouter de la passion débordante, de manière plutôt expressive. Un peu le mariage de l’eau et du feu. Ca faisait des années qu’on nous cherche à désigner le « Pippen » de Bryant, au moins l’on trouvera son « Rodman » sans trop d’hésitations. L’an dernier, l’on a beaucoup reproché aux Lakers une certaine suffisance. Des écarts qui ont fondu, une attitude pas toujours très compétitive,… Bizarrement, l’équipe n’avait pas ce genre de soucis la saison précédente. On enlève un cheerleader comme Turiaf, l’on est déjà entièrement obnubilé par retourner laver l’affront en Finale,… L’an dernier, l’on avait l’impression qu’ils jouaient comme si leur retour en Finale leur était acquis de droit. Pour faire un back-2-back, il faut avoir les reins solides et un sacré mental. Il parait que c’est encore plus dur que la première fois. Artest va être là pour secouer le cocotier quand il le sentira nécessaire. Il va avoir un rôle d’émulateur et transmettra une certaine rage de vaincre qui faisait parfois défaut l’an passé et dont les angelinos auront encore plus besoin maintenant qu’ils ont la pancarte « champion en titre » sur le dos.


Il faut aussi avouer que le précédent effectif était assez « lisse ». Maintenant que la rédemption est acquise, Hollywood en veut sûrement d’avantage. Le plus nasty était Jack Nicholson chambrant depuis sa place du premier rang. Un joueur controversé comme Artest va renforcer l’ambiance « seul contre tous » inhérente aux champions en titre. Cela va renforcer l’affectif des fans envers cette équipe. On ne lui demande pas de se mettre à quatre pattes pour aguicher le meneur adverse (sic), mais quelques actions poignantes, histoire de ressentir une forme de rage. Un peu les mêmes émotions que celles que l’on a quand on écoute Bad de M.Jackson, en fait.
L’objection courante serait que c’est bien beau de vouloir mettre le feu, encore faut-il ne pas s’y brûler. Certes. Il ne faut pas oublier que derrière leurs altercations en PO, Bryant et Artest (ou je devrais mettre Kobe & Ron, pour créer un semblant de plus grande complicité) se respectent beaucoup. Dis comme ça, ça sonne préfabriqué, d’accord. Il faut aussi voir que la rumeur Artest aux Lakers date, que des contacts anciens existent et que Kobe a souvent été élogieux par le passé au sujet de son neo-coéquipier. On parle rarement des trains qui arrivent à l’heure, mais il faut souligner qu’il existe de nombreux exemples où un Artest avec un rôle bien défini et bien entouré savait se mettre au service du collectif. Et puis, il y a Phil Jackson. Le Zen Master, avec un goût prononcé pour la psychologie. Le monsieur qui a canalisé Rodman. Le même qui a failli faire cohabiter O’Neal, Bryant, Payton et Malone sur le toit d’un volcan en ébullition. Quelqu’un qui vient de remporter son dixième titre de champion en tant que coach, pour contrôler un joueur impulsif venu ici remporter sa première bagouze. En prime, cela offrira à Phil Jackson une nouvelle étude de cas.



Parole à la Défense

Bref, je pense que l’on peut raisonnablement en déduire que Ron Artest fera assez de vagues pour booster son équipe, sans pour autant créer de ras-de-marrée. Maintenant que vous vous êtes délecté de cette superbe métaphore, intéressons-nous à son apport plus concret sur le terrain.


Forcément, ce qui arrive à l’esprit en premier, c’est son apport défensif. Meilleur défenseur en 2004. Ca fera 6 ans quand Los Angeles goûtera de nouveau aux frissons des PO. Mais à 30ans, l’on a coutume de dire que l’on est au top de son art. L’optimum entre les qualités physiques et la maîtrise technique de son sport. Le même âge que Kobe Bryant, Pau Gasol et Lamar Odom. Tant qu’à faire. LAL perd peut-être un peu de netteté sur leur projet à long terme, mais ils ont bien vu qu’il y avait des titres à gagner d’ici-là. Profiter au mieux des dernières grandes années de Bryant.


Artest reste, 6 ans après, une référence. Il était encore la saison dernière dans la seconde All-Defensive Team NBA. Distinction que n’a pas eu Ariza. Outre un trash-talking parfois déstabilisant et un style assez rugueux, Artest dispose d’un physique plutôt bien bâti, qui lui permet de jouer des coudes avec des bonhommes comme Pierce, James, Anthony ou Jefferson. Des postes 3 assez massifs, qu’il va falloir contenir pour gagner de nouveau. Il est plus lourd qu’Ariza. Face à des joueurs plus vifs, Bryant devrait pouvoir prendre le relai sur certaines séquences. N’oublions pas qu’il jouit également d’une sacrée réputation de défenseur. Ce duo risque d’ailleurs de se révéler plus complémentaire en défense qu’avait pu l’être celui composé par Ariza et Bryant.


Il sera sans doute un leader défensif, par son charisme et son intensité. Nul doute qu’il a joué un grand rôle dans l’attitude affichée par les Rockets l’an dernier en PO. Il dispose également d’une certaine expérience, et son jeu d’aides et de rotations risque de pouvoir s’avérer très efficace. Il devrait donc représenter une amélioration sur son poste, mais également sur toute l’attitude défensive de l’équipe. Il fait très chef de meute. LAL avait quelques chiens de garde plutôt efficaces, mais pas encore le genre de toutou qui montre les dents férocement et n’hésite pas à aboyer si vous passez trop près.





On the other side of the world

A vrai dire, personne n’a vraiment douté que malgré les qualités d’Ariza, Artest allait proposer une alternative au moins aussi convaincante. Le bémol viendrait surtout du secteur offensif. Artest dans le Triangle. Eté studieux en perspective. Surtout que certains aspects lui sont contre-nature. Dans le Triangle, la balle doit beaucoup bouger alors que RonRon a tendance à beaucoup ralentir la circulation de balle. Il porte beaucoup le ballon et peut se créer son shoot. En apparence, des qualités pas primordiales pour se faire une place dans le système offensif des Lakers.


Mais à bien y réfléchir, il pourrait servir de relai intéressant pour Bryant. Ce dernier, on l’a vu notamment en Finale, avait souvent le ballon en main, charge à lui de créer, souvent en allant au charbon en pénétration. Artest pourrait offrir une alternative en toutes circonstances, en prenant ses responsabilités en attaque et ainsi reposer Bryant pour le money-time. Avec ces deux lascars et Gasol, Phil Jackson pourra avoir un leader offensif sur le terrain à chaque instant, le Triangle pourra donc être structuré en toutes circonstances et donc le flow offensif devrait être continu.


Artest pourra servir de point d’ancrage de la mise en place offensive, et donc les Lakers pourront se passer de Kobe sur de plus longues séquences : cela va laisser de nouvelles opportunités à Vujacic. Le shooteur slovène avait fait de bons PO 2008, notamment quand Bryant se décalait au poste 3. Avec l’éclosion d’Ariza, Bryant squattait exclusivement le poste 2, diminuant le temps de jeu de Vujacic. Et un shooteur qui n’a plus le temps de se mettre en jambes, ça donne une saison médiocre. Artest va donc chambouler les rotations vues du côté de la cité des anges l’an dernier. Et le résultat pourrait aboutir à une gestion plus optimale du temps de jeu des forces en présence.


Il offre de même quelques nouvelles voies d’attaque. Son shoot extérieur est parfois branché sur l’alternatif, mais globalement il le fait respecter comme celui d’Ariza. Par contre, Artest peut jouer post-up avec plus d’aisance. Il offre une palette offensive plus complète que celle d’Ariza, ce qui ouvre d’autant plus les possibilités du Triangle. Encadré comme il l’est, nul doute qu’Artest saura limiter les coups de sang et autres tirs impulsifs et qu’il sera prêt à se concentrer prioritairement sur la défense. Artest a affiché d’entrée ses bonnes intentions. Ces déclarations, aussi pré convenues soient-elles, veulent témoigner d’un état d’esprit positif. Quitter Houston de son propre chef, où il aurait été un leader incontesté pour un salaire modeste, c’est le genre de signes qui laissent à penser que RonRon a la volonté de s’intégrer.


Il y a gros à gagner. Car dans cette histoire, les champions en titre passent d’un duo magique à un trident solide. Ils troquent un bon role player contre une troisième star. Il faudra des ajustements, des concessions. Mais leur envie et leur respect mutuel semblent trop tournés vers un titre de champion que ces réglages s’opéreront bon gré mal gré, d’autant plus que leur complémentarité théorique est évidente.


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