9 août 2009

Ou D : la réponse D !

Tellement de calembours ont été fait sur The Answer que celui-ci ne devrait même pas vous choquer. Il est néanmoins symbolique du flou artistique total entourant le futur d’Allen Iverson sur un terrain de basket. Les rumeurs se suivent mollement et ne se ressemblent pas. Petit point sur la chose.



Qu’elle est loin, la saison 2000-2001. Celles de tous les honneurs pour Allen Ezail Iverson : MVP du All-Star Game et de la saison régulière, meilleur bilan de l’Est pour les 76ers qui vont atteindre les Finales NBA et infliger la seule défaite de l’exercice PO 2001 aux ogres de LAL. L’idole des jeunes et des moins jeunes n’aura plus jamais l’occasion de revoir ce niveau de la compétition. Il demandera de l’aide à ses dirigeants, qui tenteront un pari en s’attachant les services d’un Webber convalescent. L’expérience n’aura pas fonctionné et l’inconcevable se produit alors : Allen Iverson est transféré.



Car Allen Iverson est une véritable icone. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à regarder les scores qu’il obtient aux scrutins populaires pour le All-Star Game. Outre son style gangsta très tendance, qui lui est conféré par ses multiples tatouages sur le corps ; les mensurations de ce petit génie (1m83, 74 kgs) en feraient presque l’égérie du rappeur français Scottie. Iverson a souvent déclaré que son gabarit de poids plume l’aura servi pour sa notoriété, les fans pouvant plus facilement s’identifier à lui. Il devient rapidement le porte-drapeau de l’équipementier Reebok, son maillot est l’un des plus vendus à travers le monde et ses prestations affolent toujours les compteurs.



Mais son transfert vers les Nuggets a fait chuter sa côte. La greffe avec Carmelo Anthony ne prend pas. Avec ces deux joueurs au fort volume de shoots, l’équipe se désarticule complètement. Le contraste est d’autant plus saisissant lorsque l’an dernier, Iverson est envoyé à Detroit en échange de Billups. Le meneur gestionnaire va faire des miracles avec l’effectif de Denver, alors qu’Iverson est projeté dans une équipe des Pistons qui a perdu son âme en même temps que son capitaine. Bref, l’image de The Answer est sérieusement écornée : il est alors perçu comme un soliste égoïste. Pire encore, après deux 8èmes places consécutives pour ses équipes respectives – et les sweeps en PO qui vont avec- voilà que ce compétiteur acharné est considéré comme un looser.



Pour moi, le trait est bien trop grossi. Iverson a été habitué à être le point central du schéma offensif, ce qui apparaît assez logique vu le talent de scoreur du garçon. Vouloir le reconvertir, après tant d’années (universitaires ou pro) serait extrêmement difficile, qu’il y mette de la bonne volonté ou pas. De plus, ce joueur est un marqueur exceptionnel, avec une capacité à pénétrer n’importe quelle défense. Un tel talent devrait être mis sur un piédestal. On l’accuse de ne pas s’être fondu dans le collectif de ses deux derniers clubs, il faut noter qu’aucune de ses deux équipes n’avait le dispositif pour catalyser l’impact d’Iverson. Qui a la plus grande part de responsabilité : le joueur qui joue ses meilleures gammes, quitte à ne pas être en symbiose avec le reste de l’équipe ; ou le GM qui a jeté son dévolu sur un joueur inadapté ?



Car Iverson est un joueur avec un sacré caractère voire même, lâchons le mot, un gros ego. Il veut jouer son jeu (« faire du Iverson », comme il dit) et être le meilleur dans ce secteur, plutôt que d’être du genre banal en faisant autre chose. Il a besoin de porter la balle pour être vraiment efficace. Cela ne le rend pas soliste pour autant. Certes il n’est pas organisateur pour autant, mais sa vivacité crée de nombreux espaces que des joueurs complémentaires devraient pouvoir saisir. Lors de l’épopée des 76ers en 2001, Iverson tournait à 6 passes décisives par match. Puisqu’on les compare souvent, rappelons que Kobe Bryant sur ces PO 2009, dont on vante à juste titre le côté altruiste, pointe à 5,5 passes décisives. Un grand pouvoir impliquant de grandes responsabilités, avoir un talent comme celui d’Iverson impliquerait qu’on doive l’entourer de la meilleure manière qu’il soit. Il ne l’a pas été sur les dernières saisons, ses coéquipiers n’étant pas sur la même longueur d’onde ont regardé le lutin magique se perdre dans d’interminables dribbles sans pouvoir proposer une alternative, un block, une prise d’intervalle,… au moment opportun.



Bref, il serait vraiment dommage de se quitter là-dessus. Certes The Answer peut symboliser certains excès de la NBA, mais il n’en reste pas moins un magicien ballon en main. A maintenant 34ans, la flamme semble encore présente et Iverson meurt d’envie de redorer son blason. Il doit sans doute prendre personnellement sa baisse de popularité et c’est au final ce qui doit rendre frileux certains acquéreurs potentiels, car la nuance entre son jeu et celui d’un pur croqueur n’est quand même pas épaisse. Tour d’horizon des rumeurs le concernant :



Why don’t you get a job ?

On le voit souvent à Charlotte. Il faut dire que l’environnement est propice à l’y voir : Larry Brown, son mentor lors de ses glorieuses années à Phily office dorénavant aux Bobcats, une équipe qui a un sacré déficit offensif, finissant parmi les pires attaques de la ligue. The Answer aurait à disposition un bon monticule de tickets shoots. Reste que l’effectif l’entourant risque de ne pas être d’une complémentarité folle et que Larry Brown semble avoir d’autres projets de jeu. Toujours est-il que sportivement, Charlotte apparaît comme le lieu le plus propice pour qu’une greffe prenne.



On l’a aussi annoncé aux Clippers. Pour une signature purement économique : aguicher les fans pour vendre d’avantage des billets. Qui d’autre qu’une star mondiale comme lui pour tirer les Los Angeles Clippers hors de l’ombre de leurs colocataires au Staple Center ? Mais cela aurait également pour conséquence de désintégrer totalement le jeu des Clippers. L’arrivée de Griffin semble clarifier les projets de jeu des Clips ; et un backcourt Davis – Iverson bloquerait trop la balle et mettrait entre parenthèse le développement de jeunes comme Gordon. Dans le même genre, l’on a la rumeur l’envoyant du côté de Memphis, où il risque d’entraver sévèrement un futur prodige comme OJ Mayo, qui va déjà devoir gérer l’alimentation d’un sacré gugusse en la personne de Randolf. Iverson à LAC ou Memphis risquerait de perturber grandement des relations offensives encore en construction.



Autre deal d’avantage de l’ordre de l’image, celui qui l’enverrait du côté de Big Apple. Bien sûr, il s’agirait d’un contrat d’un an, en guise d’amuse-bouche pour les fans en attendant d’autres grosses stars pour l’été 2010. Mais un marché aussi grand que celui de New York avec une aura comme celle d’Iverson, cela risque de déboucher sur des revenus marketing assez énormes. Surtout que la mentalité de battant de The Answer risque de séduire les fans des Knicks, habitués à voir jouer sous leurs couleurs des joueurs résignés. Mais au-delà de ça, Iverson pourrait avoir un impact très positif sur le jeu offensif des Knicks : il pourrait cimenter le jeu de NYK, qui part souvent n’importe où. De plus, il apporte une alternative très crédible sur jeu posé. Une option plutôt satisfaisante sur le court terme pour les deux partis : New York vivra une saison moins pénible que les précédentes et pourra d’avantage faire illusion, alors qu’Iverson y trouvera un terrain de jeu où il pourrait exprimer tout son talent. Ce ne serait certes pas la panacée – je pense que les Knicks n’accrocherait quand même pas un spot en PO – mais cela pourrait être une bouffée d’air frais bienvenus pour ces deux entités mythiques en claire perte de vitesse.



Pour tutoyer de nouveau les sommets des classements, une autre rumeur persistante envoie Iverson au Heat. Un duo Wade – Iverson à l’arrière pourrait faire du grabuge, car on l’a vu lors des JO 2008, D-Wade peut être efficace sans être le point central de l’attaque. Mais de nombreuses incertitudes planent quand même sur la réussite concrète d’une telle association. Surtout qu’avec Wade capable de devenir free-agent dès l’été prochain, ce n’est peut-être pas le moment de prendre des risques du genre.



Toutes ses pistes ne sont que moyennement solides et sont majoritairement restées à l’état de rumeur. L’on parle alors d’Iverson en Europe. L’Olympiakos –décidemment très présente dans les transferts NBA- aurait offert près de $10 millions sur deux ans pour s’attacher les services de cette icône NBA. On imagine mal quelqu’un ayant tellement représenté la ligue nord-américaine venir jouer sur le Vieux Continent. Néanmoins, il est loin d’avoir été ridicule en contexte Fiba lors des JO d’Athènes. Mais cela va demander un gros effort d’adaptation tant du joueur que de ses coéquipiers (et ils sont nombreux à être bons à l’Olympiakos), et pas sûr que The Answer se voit vraiment finir sa carrière en Euroligue, quand même moins glamour que la NBA, surtout outre-Atlantique.



Voilà donc les pistes les plus sérieuses évoquées au sujet d’Allen Iverson. Toutes comportent des bémols. Alors que les GMs comptent leurs sous comme jamais, il est difficile de faire signer un joueur de 34 ans dont les dernières saisons ont mis en exergue les limites et défauts. Il serait quand même dommage qu’il n’arrive pas à trouver un club pour la saison prochaine, cela serait faire injure à l’énorme talent balle en main de ce petit magicien.

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