30 septembre 2009

Pau Gasol sur le toit du monde

Que de choses ont changées depuis que les Memphis Grizzlies l’ont drafté. Son jeu s’est certes peaufiné durant ses huit années en NBA, mais ce qui a le plus changé est sans aucun doute le regard des autres.

Aujourd’hui, sur la planète basket, Pau Gasol est incontournable. Elu très logiquement meilleur joueur de l’Euro 2009, l’espagnol commence à accumuler les sacres avec sa sélection, qui viennent compléter un glorieux titre de Liga glané avec le Barça en 2001. De plus, il symbolise le mélange idéal entre un intérieur Fiba et un intérieur NBA (rappelons qu’il a été en juin dernier le premier espagnol à soulever le trophée O’Brien). Allez, osons le mettre noir sur blanc : si l’on devait attribuer l’équivalent du Ballon d’Or, ça serait cette année pour Pau Gasol. Et de loin.

J’avoue, il y a quelque chose de jouissif à dire que ce grand barbu hirsute se place au-dessus des superstars comme Lebron James, Dwane Wade et consors. Des grandes stars américaines qui ont affolé les compteurs en NBA et qui ont su porter la Redeem Team vers un Graal retrouvé. Mais les faits sont là aussi pour appuyer cette vision : Pau Gasol sort d’une année d’une solidité impressionnante. Il n’y a qu’à regarder ses stats pour voir l’étendue de l’abattage énorme réalisé par l’espagnol ; mais le plus dingue, c’est que sa production va bien au-delà de toutes ces informations chiffrées.

Pour commencer, son intelligence de jeu est juste phénoménale. Il suffit de voir combien de temps il a mis pour s’imprégner de l’Attaque en Triangle, qui est quand même loin d’être neutre en matière stratégique. Il n’a eu besoin de quasiment aucun temps d’adaptation. Il comprend parfaitement les mécanismes du basket et les embelli avec une gamme de mouvements : tirs mi-distance, main gauche ou main droite près du cercle, certaine aisance au dribble pour un gaillard de son envergure,…C’est simple, il peut enchaîner n’importe quel opposant. Ou plutôt, il sait comment appuyer sur une faille adverse. Et derrière, le moindre décalage est sanctionné par un habile jeu de passes. Il est rare qu’un joueur avec son envergure de jeu rende les autres joueurs statistiquement meilleurs ; c’est pourtant ce qui est notamment arrivé pour Lamar Odom avec l’arrivée de Gasol chez LAL. En défense, son appart est de même colossal. Dans la législation Fiba, c’est un véritable rempart ; et il a abattu un sacré travail pour entraver l’apport d’un Dwight Howard aux mensurations hors-normes.


Avec un placement toujours judicieux, (des aides précieuses venant notamment de Odom) et un travail chirurgical au niveau des prises de position et surtout d’appuis, Pau Gasol a tenu la dragée haute à ce molosse. Un sacré contraste par rapport à la Finale précédente où l’espagnol a tout simplement été mangé en intensité par des Celtics morts de faim. La presse l’accable d’être trop soft ; il y avait une part de vrai là dedans. L’attitude n’était pas vraiment la même, mais l’on est d’avantage en présence d’une revanche que d’une remise en question : son style de jeu n’a pas fondamentalement changé, il est resté loin d’un style rentre-dedans qu’on lui recommandait il y a 14 mois. On se plaignait également de ses nerfs pas toujours présents pour les grands rendez-vous. Outre donc cette disparition lors de la Finale face aux C’s, il y a eu cette finale européenne, à Madrid, pour des espagnols archi-favoris, qui ont sombré pitoyablement dans l’ultime période et avec un Pau Gasol tout sauf chef de file. Il vient d’être élu MVP de l’Euro 2009, sans aucune discussion possible et s’est révélé particulièrement productif durant les matchs à enjeux directs (qualifications ou matchs couperets).

Ces deux tares ont été gommées. D’une part par l’amplitude des médias : le perdant à toujours tord et gloire au vainqueur. Mais même en essayant d’avoir du recul là-dessus, il faut bien admettre qu’il y a une évolution. Paradoxalement, jouer avec Kobe Bryant semble lui avoir donné goût aux responsabilités. On l’a notamment vu dans cette dernière campagne avec l’Espagne où il a été encore d’avantage un point d’ancrage que lors de ses précédentes sorties ibériques. On sent qu’il dégage une toute autre stature dorénavant, une approche de la gestion collective plus proche de ce que propose Bryant en club. Il n’est plus le joueur dominant de la sélection, il est un vrai patron. Et puis, les grandeurs appellent les grandeurs. Même si il a connu le Barça et les plus hautes joutes de la Liga, la passion médiatique est tout autre quand on arrive en Finale NBA, surtout quand on est le premier espagnol à y jouer un rôle important et que les médias ibères ont suivi massivement l’évènement. De plus, Phil Jackson a du également y ajouter son petit grain de sel, il n’y a qu’à voir la complicité qui régnait entre ces deux-là pendant les accolades post-victoire du Game 5 des Finales. La psychologie du Zen Master a du l’aider à franchir un pallier.


Il ne faut pas oublier non plus que le vrai Mvp des Lakers pendant cette dernière saison régulière, c’est bien Pau Gasol. Que ses stats sont globalement les même que quand il était le chef de meute à Memphis. Qu’il est passé d’une sélection honorifique de All-Star en 2006 à un potentiel Hall of Famer, de l’avis d’un récent article de espn.com. Il n’a pourtant fondamentalement rien et tout changé à la fois. Son jeu est toujours resté aussi bien léché et calibré, avec les qualités évoquées plus haut. Il est juste arrivé cette année au sommet de son art. Une maîtrise parfaite de son jeu et des évènements. Atteindre ce niveau d’aboutissement (voire de perfection) sur l’ensemble de l’année est juste phénoménal.

On va donc boucler la boucle sur ce point. C’est cette maestria sur l’ensemble des facettes de son jeu qui me fait dire que Pau Gasol est LE joueur de l’année. Peut-être y en a-t-il eu des plus forts cette saison, qui ont été plus productifs, mais aucun n’a su aussi bien ficeler son jeu que Gasol pour le délivrer de manière aussi propre et totale.

2 commentaires:

  1. bravo. Il fallait le dire, Gasol est un des tous meilleurs joueurs de basket du monde, et en plus, c'est bien dit ;)

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  2. Il a fait gagner l'Euro à l'Espagne presque à lui tout seul. Au niveau européen il est intouchable, en NBA ils sont très peu à pouvoir le contenir, car les costauds (Howard par exemple) n'ont pas sa mobilité ni son altruisme. Une arme impressionnante et surtout très difficile à rendre inefficace...

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