24 avril 2010

Quand les maths se mêlent à la course au MIP

On le sait, la Nba fourmille de stats en tous genres. Et nombreux sont ceux qui dissèquent les chiffres pour en faire des outils très pointus et détaillés. Cette discipline à part entière s’appelle l’APBRmetrics. Nous y reviendrons sans doute dans un billet cet été, une fois la folie des PO passés.

Mais aujourd’hui, l’on parle du trophée de MIP, celui du joueur ayant le plus progressé. Tâchons de voir si l’on peut de façon objective désigner un lauréat. Nous allons voir que même quand les chiffres s’en mêlent, difficile de désigner un vainqueur parfaitement objectif.

Pour toute simulation mathématiques, il faut définir son référentiel. Il doit y avoir une multitude de modèles possibles. Nous allons nous appuyer sur celui de notre confrère américain de basketball-reference, qui est très détaillé et simple d’accès.


Tout d’abord, il faut calculer le Win Share per 48 minutes de chaque joueur. Le WS/48 correspond à la production d’un joueur pour les victoires de son équipe. En 48mins, combien de victoire un joueur fait-il gagner à son équipe. Victoire au singulier, puisque le basket reste un sport d’équipe ; la moyenne atteint un WS/48 de 0.100

Cette unité de mesure prend en compte deux paramètres : l’attaque et la défense. En attaque, l’on détermine le nombre de points induits par un joueur : points marqués, mais aussi passes décisives. Le tout est pondéré par le nombre de possessions offensives à laquelle à pris part le joueur, le rythme de l’équipe,… Il en est de même pour la défense. Je reste volontairement succinct sur cette partie, assez technique, mais sachez qu’un livre, Basketball on Paper, reprend en détails tous ces éléments. De toute façon, le but ici n’est pas de faire de nous des experts comptables des statistiques Nba, mais juste de visualiser le principe.

Pour faire simple, il s’agit de chiffrer le plus correctement possible l’efficacité offensive et défensive d’un joueur ; surtout dans un but comparatif. Histoire de vous faire une idée, Lebron James culminait à 0.202 l’an dernier ; alors qu’un joueur moyen atteignait donc 0.100

Maintenant, passons à un second outil. Le SPS, Simple Projection System. Il s’agit d’un script qui prend en compte le WS/48 des dernières saisons (généralement, les 3 dernières) et visualise la courbe de progression, qu’il pondère principalement par l’âge. Le SPS est censé nous donner le niveau de performance d’un joueur que l’on est légitimement en droit d’attendre de lui pour la prochaine saison.

C’est là que l’on commence à s’amuser. L’on compare les résultats du SPS en début d’année avec les résultats effectifs enregistrés au fil de la saison. En 2009-2010, cela donne ça :

Rk--Player-----------------------------WS/48--------Proj---------Diff
1_Kevin Durant____________0.2328____0.1008____0.1320
2_Luke Ridnour____________0.1651____0.0720____0.0931
3_Quentin Richardson______0.1278____0.0480____0.0798
4_Jermaine O'Neal_________0.1418____0.0624____0.0794
5_Donte Greene____________0.0400____-0.0384____0.0784
6_Zach Randolph___________0.1594____0.0816____0.0778
7_Russell Westbrook_______0.1157____0.0384____0.0773
8_J.J. Redick_____________0.1699____0.0960____0.0739
9_Josh Smith______________0.1614____0.0912____0.0702
10_Channing Frye___________0.1389____0.0720____0.0669


On notera plusieurs choses. La renaissance aux Suns de Channing Frye apparaît clairement. J.J.Redick passe du mec de garbage time à joueur de rotation. Même le nouvel état d’esprit de Zach Randolph s’est retrouvé traduit dans les chiffres. Vu leur âges et la pente glissantes sur laquelle ils étaient, Quentin Richardson et Jermaine O’Neal ont réalisé une saison honorable. Donte Green passe d’un looser (WS/48 négatif) à quelqu’un qui apporte enfin quelque chose de positif.

Et puis, donc, tout en haut de ce classement, l’on trouve Kevin Durant. Avec, au passage, un WS/48 plus important que Lebron James l’an dernier, alors auteur d’une saison que tout le monde a qualifié de quasi-historique. Mais le fait est que Kevin Durant était destiné à exploser, beaucoup le voient comme en haut de l’affiche pour les années à venir, et rares sont les superstars à avoir glané ce trophée. Le MIP a un aspect un peu surprise et le donner à un joueur qui allait –certes peut-être pas aussi vite- percer quoiqu’il arrive n’est pas dans les habitudes.

Et puis, il y a aussi d’autres éléments dans l’environnement d’un joueur qui sont sans doute pas quantifiables, ou alors sans grande subtilité. Par exemple, Scott Brooks a été élu coach de l’année et nul doute qu’il a aidé Kevin Durant a élevé son niveau d’efficacité, sans que cela ne puisse être clairement mesurable par les formules.

Cette méthode n’a de toute façon pas vocation à être un argument autoritaire. Mais l’on ne peut pas nier son importance indicative. Elle permet de faire le tri parmi les vrais prétendants et ceux qui auront bénéficié d’un buzz. Regardons Aaron Brooks, lauréat 2010 :
Rk-----Player--------------WS/48---------Proj--------Diff
106 _Aaron Brooks____0.0899____0.0912___-0.0014


Ca la fout mal. Aaron Brooks est resté au même niveau d’efficacité. Certes, son temps de jeu a augmenté. Deux hypothèses sont alors possibles. Soit réussir à conserver son niveau d’efficacité en jouant plus longtemps est une prouesse, car il faut noter qu’il a augmenté son temps de jeu de près de 10mins par match, ce qui est loin d’être négligeable. Soit il s’agit juste d’une évolution logique vu sa courbe de progression et qu’il a gonflé ses stats grâce à un plus gros temps de jeu, sans que cela ne traduise une véritable amélioration de son niveau de jeu.

Pour info, Trevor Ariza est avant-dernier avec une différence de -0.0898. La confirmation que son agent avait tord de tenter l’aventure hors de Lalaland en espérant glaner plus d’argent.

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